Sa vie de plume commence par une enfance de lecture frénétique. Quand d’autres grimpent aux arbres, sautent dans les flaques et admirent les fourmis, Laurence lit. Sur les bords de l’Oise, à l’arrière de la voiture familiale, dans les dîners, aux anniversaires, elle lit. Et dans le dédale des pages, elle cherche « comme une entomologiste » à répondre à cette question qui imprègnera plus tard l’ensemble de sa démarche d’écriture : « qui sont les autres ? ».
Pour ses études qui seront naturellement littéraires, Laurence quitte Compiègne. À Paris, après un crochet par la prépa et le CELSA, elle arrive là où elle devait être, en école de journalisme. Ce qu’elle aime, c’est poser ses questions, toutes ses questions, parfois jusqu’à lever le voile de l’intime pour comprendre les rouages et les sinuosités de ces vies qui ne sont pas la sienne. Elle est là où il faut pour creuser, encore, cette idée de « qui sont les autres et comment font-ils » ?
Une fois diplômée, elle entre rapidement à L’Express. L’enfant solitaire a grandi et « Laurence la journaliste » rencontre en chair et en os les personnages dont, petite, elle lisait frénétiquement les histoires. Pendant 14 ans, elle va arpenter les couloirs du magazine, au « Mag », au service culture, au service politique à l’éducation… Laurence va partout et interviewe tout le monde : un prix Nobel de physique, Nabilla, des stars de cinéma, des mannequins, des politiques, des syndicalistes… avec pour tous et sur tous les sujets la même avidité et une curiosité toujours renouvelée.
Au fil de ses rencontres et à l’ère de Loft Story, Laurence Debril sent que le rapport de la société à l’intime est en train de changer. Les secrets que les « peoples » s’évertuaient à cacher jalousement hier se pavanent désormais dans les gros titres. De ce constat naît People, le grand déballage (2006) qu’elle co-écrit avec Renaud Revel, une réflexion sur le business de l’intimité comme moyen de communication.
Laurence Debril aime aussi le travail d’écriture au long cours et rédige plusieurs ouvrages comme ghostwriter. Elle écrit les textes d’un ouvrage de photographie sur la baie de Somme (2007), se rend au Népal pour coucher sur le papier l’histoire d’Ani Chöying Drolma, nonne tibétaine bouddhiste et star mondiale de la chanson dans Ma voix pour la liberté (2008), accompagne Jean-Loup Durousset dans l’écriture de son ouvrage Le privé peut-il guérir l’hôpital (2010), entame le récit (secret) d’un des grands faits divers des années 2000…
En 2014, les planètes s’alignent et la vie de Laurence bascule. Ni cuisinière ni bretonne, elle laisse pourtant derrière elle sa carrière à L’Express pour l’amour, la Colombie et la billig ! Celle qui n’a jamais vraiment cuisiné part avec son mari franco-colombien pour Cali, où ils ouvrent Biscuit, une crêperie qu’ils feront vivre pendant 4 ans au rythme des services et des galères quotidiennes. C’est dur physiquement, nerveusement, logistiquement et économiquement mais Laurence aime profondément cette vie de débrouille à la rencontre de ce pays et de ses clients. Râteaux et spatules dans une main, mais toujours une plume dans l’autre, Laurence continue inlassablement d’écrire. Elle documente ses aventures dans un blog très drôle qui embarque le lecteur dans sa folle vie colombienne. Les rôles s’inversent alors et celle qui racontait la vie des autres se retrouve dans les colonnes de Femme Actuelle rubrique « Ils ont changé de vie ».
En parallèle de cette aventure culinaire et entrepreneuriale, Laurence poursuit des activités d’écriture professionnelle. Elle investit le champ de YouTube dans les domaines du proofreading et de la traduction avant de subir l’arrivée de l’IA. Forte de son expérience avec Biscuit, elle décide alors de prêter sa plume à des entrepreneurs, des CEO, des professionnels de la santé, …, et rédige leurs portraits (70 au compteur !) pour le compte de Media-Start. Depuis six mois, et à la faveur du passage de Meghan et Harry à Cali (rien que ça !), Laurence a repris du service auprès des « Peoples », versions royaux cette fois, et travaille désormais comme Responsable d’édition web pour Point de Vue.
On l’aura compris, Laurence aime rencontrer les gens, comprendre leur vie, leur poser les bonnes questions. Ils sont la matière première de son inspiration, qui vient comme par jaillissements. A Cali, où elle mène une vie très riche, elle se languit parfois du contact avec ses pairs. Elle décide de rejoindre la Guilde des Plumes en janvier 2023, et ainsi l’association traverse l’Atlantique ! Elle découvre une communauté chaleureuse de profils variés, prompts à partager leurs expériences et leurs meilleurs conseils.
Du palimpseste des vies qu’elle a lues, écrites, vécues, elle tire une curiosité toute particulière pour l’intensité avec laquelle les lieux communs de l’existence (les premières amours, la maternité, la ménopause, le deuil) semblent toujours prendre de court ceux qui les vivent. Elle entame sa réflexion sur le sujet avec sa nouvelle « Bambi », qui lui vaut le 1er Prix de la nouvelle francophone inédite en 2023. Son rêve de plume ? Approfondir cette méditation et concrétiser ce projet de roman qui l’habite. Le sujet ? La mort et les personnages qu’elle crée lorsqu’elle apparait dans les vies. Titre de travail : Il était une fin.
Raphaëlle Farge (de Lafforest)